Nous sommes au-delà des sommets enneigés des Monts Célestes, au-delà de l’Asie Centrale post-soviètique, tout en bas des Tian Shan dans la dépression du Tarim, là où les oasis jalonnent la périphérie du terrible désert du Takla Makan, à l’Ouest de la Grande Muraille. Il y a bien longtemps déjà les caravanes des chemins de la Soie sillonnaient les dunes, affrontaient la chaleur et la sècheresse de cette zone aride et pourtant cernée de cimes enneigées.
Des monstres secrets, répertoriés sur la cartographie ancienne, et les hordes barbares terrorisaient les chameliers les plus déterminés.
C’est le pays des Ouïgours, turcophones et frères de sang des Ouzbèques de Samarkand et Boukhara.
C’était le Turkestan oriental dont l’unité politique n’a perduré que quelques années.
C’est aujourd’hui le Xinjiang chinois, au Nord du Tibet, une région riche de pétrole, d’uranium, de métaux rares et d’intérêts géopolitiques majeurs que l’Empire révolutionnaire de Mao colonisa dès 1949. Les Hans, encouragés par Pékin, y sont de plus en plus nombreux et occupent les postes prépondérants.
Mon immersion dans ce monde ouïgour dura presque 12 semaines, et je me laissais aller, malgré tout, à goûter sans mesure le charme des lieux, l’hospitalité débordante de chacun, la culture musicale de tout un peuple attaché à son passé et à ses traditions... Tout me semblait immuable depuis la nuit des temps. Mais aujourd’hui les rafales du désert côtoient d’autres souffles plus vertigineux : ceux de la Chine en marche.
Nous irons à la rencontre du Takla-Makan et de ses oasis, mais aussi de Mominejan le chamelier, de Nourfira, sa mère adoptive, de Meïssoura et de ses amies, de leurs vies et de leurs joies souvent plus fortes que leur détresse.